Vous les avez sans doute vues sur nos plages ou en lisant les journaux, des vélelles, organismes planctoniques flottant à la surface de l’eau, se sont échouées en nombre ces dernières semaines.
Une vélelle, mais pas un seul animal
Les vélelles, lorsqu’elles sont nommées au même titre que les physalies (ou galère portugaise), laissent penser qu’il ne s’agit que d’un seul individu. Or, leur mode de vie est un peu plus complexe que celui d’une méduse s’échouant sur nos côtes. En réalité, c’est une colonie, on la qualifiera donc de méga organisme, car son fonctionnement repose sur la cohabitation symbiotique de dizaines de polypes, s’affairant à diverses tâches vitales pour la colonie.
Sur ce radeau, à l’instar d’un bateau rempli de marins, chaque polype s’occupe d’un tâche précise. Certains pêcheront du zooplancton, d’autres seront chargés de la défense ou de la reproduction et un seul aura le rôle de nourricier (le chef cuistot, en soi). Aussi spécialisés, ces polypes ne peuvent à titre individuel aucunement survivre, car ils dépendent tous les uns des autres.
Urticantes mais pas virulentes
Colonie flottante et apparentée aux méduses, la vélelle est bien un cnidaire, au même titre que les physalies. Cependant, elle ne pique que très peu là où sa cousine, elle aussi flottante, est très dangereuse, provoquant même parfois la mort !
Heureusement, ces petits radeaux ne vont pas jusque-là, leur venin est même quasi inefficace contre notre peau. Évidemment, il ne faut pas les manipuler et porter ensuite ses mains à sa bouche ou ses yeux. Les peaux les plus sensibles comme celle des enfants peuvent être néanmoins victimes de rougeurs et de démangeaisons. Il vaut mieux donc les éloigner de ces bateaux miniatures.
Une biologie étonnante
Cet « animal » ne s’arrête pas au fait d’être une colonie organisée, ses tissus accueillent également d’autres organismes symbiotiques : les zooxanthelles. Micro-algues dinoflagellés, ce groupe atypique a pour habitude de vivre en étroite collaboration avec des animaux tels que des coraux, des méduses et des anémones, pour ne citer que les cnidaires. Elles leur donnent donc une petite teinte brune et leur procure une partie de leur nutrition via la photosynthèse en échange d’un abri.
Aussi, grandissant en haute mer et les rendant ainsi cosmopolite, 50% de la population verra sa voile orientée vers la gauche, suivant le plus grand axe de la forme du radeau. L’autre moitié aura quant à elle sa voile orientée vers la droite. Cette biologie singulière leur permet en fait d’assurer au minimum la survie de la moitié de la population, une ira potentiellement s’échouer sur les côtes et l’autre s’éparpillera de l’autre côté des océans. Ainsi donc, lorsque vous observerez un nouvel échouage sur nos côtes, une rapide inspection vous permettra d’affirmer que toutes ces colonies ont bien leur voile toute dans le même sens !
Aussi, parmi ces échouages, un gastéropode aux couleurs délicates peut se mélanger à cette masse violette : c’est en fait une janthine, prédatrice des vélelles, vivant elle-même en haute mer ! Tout comme sa proie, sa biologie toute particulière lui confère un étrange flotteur qu’elle crée elle-même à partir de son mucus, composant ainsi un radeau de bulles ! Elle voguera donc auprès de ses proies, la rendant elle aussi planctonique. Enfin, le poisson-lune est un autre de ses rares prédateurs se régalant colonie par colonie pullulant en mer, une chance encore que cet animal ne soit pas très dégourdi.